Les échanges électroniques font aujourd’hui partie de la vie quotidienne de nombreux citoyens, entreprises ou administrations mais les deux échanges dont il est question portaient chacun sur des actes publics obéissant à des règles précises et contraignantes datant du Code Civil promulgué en 1804 et régulièrement reprises dans les textes plus récents.
Le 13 octobre 2001, la Mairie de SAINT SEBASTIEN SUR LOIRE a notifié à la Mairie de VERTOU, la naissance du petit Mathéo né la veille par un procédé sécurisé sur INTERNET. Cet avis permet la mention sur les registres d’état civil de la Ville de VERTOU.
Le 18 mai 2004, dans le cadre du 100ème Congrès des Notaires de France, un acte authentique électronique de vente d’immeuble a été dressé par deux notaires qui ne se trouvaient pas dans le même lieu mais chacun en présence de leur clients.
Ces deux évènements sont passés relativement inaperçus mais constituaient, sans doute, pour chacun d’eux une première mondiale.
Les échanges électroniques font aujourd’hui partie de la vie quotidienne de nombreux citoyens, entreprises ou administrations mais les deux échanges dont il est question portaient chacun sur des actes publics obéissant à des règles précises et contraignantes datant du Code Civil promulgué en 1804 et régulièrement reprises dans les textes plus récents.
Il s’agissait dans les deux cas de montrer la possibilité de dématérialiser des moyens de preuve bénéficiant par délégation de l’Etat de la foi publique.
A l’heure où Internet pénètre la société française plus vite que la télévision ne l’a fait il y a quelques décennies, ou le commerce électronique commence à exploser, ces deux évènements peuvent paraître banals, mais ils constituent la démonstration de l’intégration définitive des technologies dans notre système juridique et dans notre système social.
Ceci est d’autant plus important que les actes authentiques qu’ils émanent des officiers d’état civil ou des notaires sont une des caractéristiques essentiels des systèmes juridiques de droit latin qui s’affrontent dans le monde au droit anglo-saxon.
Ma double expérience d’élu local et de responsable national du notariat me permet aujourd’hui de mesurer les enjeux territoriaux des T.I.C.
Les technologies de l’information et de la communication sont un instrument d’organisation pour une profession – le notariat – dont le quadrillage juridique du territoire est l’une des missions que lui a confié l’Etat (I). Ces technologies sont aussi un moyen de modernisation du service public local (II).
I – Dès les années 1970 le notariat français s’est informatisé notamment pour la rédaction de ses actes et la tenues de la comptabilité des offices. Parallèlement, le profession s’est vu confié par l’Etat français la tenue du fichier des testaments aujourd’hui informatisé.
Depuis 1997, sous l’impulsion d’Alain LAMBERT, alors président du Conseil Supérieur du Notariat, la profession s’est doté d’un INTRANET sécurisé dénommé le réseau REAL. La plupart des notaires est doté d’une carte dite carte REAL lui permettant aujourd’hui de s’identifier en tant que notaire et demain de signer un acte authentique.
Chaque notaire – et ses collaborateurs – bénéficient d’un accès sécurisé à des bases de données juridiques, à des fichiers de références de valeurs immobilières etc.
Le fichier central des testaments peut-être consulté en temps réel. La carte REAL du notaire contient un identifiant unique d’utilisateur et un jeu de clés cryptographique. Elle est personnalisée grâce au code porteur. La sécurité du système repose sur le principe des clés asymétriques qui vont par paire (une clé privée et une clé publique) et sont complémentaires. La carte contient un certificat dont le rôle est de garantir le lien entre l’identité du porteur de la carte et les clés cryptographiques.
Cette technique permet d’utiliser les procédés de signature électronique sécurisé qui permettront aux notaires de dresser leurs actes à distance.
Le véritable défi que la profession est en train de relever est, en effet, de dresser des actes authentiques sur supports électroniques. La loi du 13 mars 2000 sur l’adaptation des moyens de preuves aux nouvelles technologies s’applique aux actes authentiques qui sont dans notre système juridique (celui de 20 des 25 pays de l’Union Européenne) le moyen de preuve le plus élaboré et le plus sûr.
Ce défi est d’abord un défi technique car l’acte authentique se doit d’être – dès qu’il est établi – inaltérable. Il doit être conservé dans toute son intégrité afin que puisse en être délivré des copies dont on aura la certitude qu’ils sont le reproduction exacte de l’original.
Ce défi est ensuite un défi juridique car l’authenticité d’un acte n’est pas seulement un instrument de preuve mais c’est aussi la garantie de l’intégrité des consentements des signataires et de l’équilibre du contrat qui les lie.
En abolissant les distances, l’acte authentique sur support électronique est aussi un moyen de permettre aux offices de notaire de continuer à être implantés sur l’ensemble du territoire tout en satisfaisant les besoins d’une clientèle de plus en plus mobile.
Enfin, les infrastructures nécessaires au notariat pour l’intégration de ces technologies peuvent se répartir sur le territoire national (notamment les futurs serveurs d’archivage des minutes électroniques des notaires) et contribuer ainsi à l’aménagement du territoire.
Le notariat prépare avec ses grands partenaires : la Caisse des Dépôts et Consignations, la Direction Générale des Impôts etc. des infrastructures d ‘échanges dématérialisés qui contribuent à la modernisation du service public. Il a mis en place une plate-forme d ‘échanges qui permet d’assurer aux destinataires d’une information, d’une demande ou d’un acte qu’ils émanent d’un notaire en exercice et à une date ou une heure incontestables.
II – Du notariat aux collectivités locales, il n’y a qu’un pas à franchir tant le quadrillage territorial est un facteur commun de ces institutions. Les premières expériences d ‘échanges dématérialisés entre collectivités locales et offices notariaux vont bientôt voir le jour. Les technologies apparaissent aussi comme un moyen de modernisation du service public local. Le ministère de l’Intérieur met, lui aussi en place une plate forme d’échanges sécurisé dénommée FAST.
Grâce à cette plate-forme, dans les Yvelines, se déroule une expérience de transmission des délibérations des conseils municipaux vers la préfecture tendant à un véritable contrôle de légalité électronique. Demain les procédures de préemption se feront par Internet.
Tout ceci peut paraître anodin à l’utilisateur d’un ordinateur connecté à Internet mais les problèmes juridiques de ces transmissions sont importants.
Il faut, par exemple, régler les problèmes de point de départ des délais qui sont essentiels en droit administratif, car ce sont ces délais qui conditionnent le recours des administrés contre les décisions d’un préfet ou d’un maire.
De manière déjà traditionnelle, la monétique est entrée dans les collectivités locales pour l’accès aux multiples services municipaux.
Cette intégration des technologies dans les collectivités locales est un facteur de modernisation du service public et un véritable enjeu territorial. Il s’agit en effet de pouvoir maintenir une proximité des citoyens avec le service public que les moyens traditionnels auront des difficultés à maintenir sur l’ensemble du territoire.
Demain ou après-demain c’est l’exercice de la démocratie qui se trouvera confronté aux technologies. La consultation des citoyens par INTERNET est déjà expérimentée. Le vote électronique dans des lieux publics ou même de chez soi fera partie de notre environnement.
Le véritable défi n’est en réalité plus technologique mais sociologique et politique. La dématérialisation des échanges juridiques ou des procédures et la modernisation du service public devront aller de pair avec le maintien du lien social.
Le notaire dans son domaine et l’élu local dans le sien y trouveront certainement un nouvel élan.